L’histoire de la Terre de Salvanet est connue depuis le Moyen Age, au fil des âges le château de Salvanet a connu des évolutions et des épisodes parfois tragiques. Aujourd’hui la septième génération de propriétaires du Château de Salvanet s’emploie à rénover et faire vivre cette demeure du XVIIIème siècle.
Du Moyen Age à 1849, le domaine de Salvanet.
L’histoire de la terre de Salvanet et de ses seigneurs est connue depuis le Moyen Age. Ce territoire était alors le fief de la célèbre maison féodale de Comborn, connue depuis l’an 962. Mais l’histoire récente de Salvanet commence véritablement en 1509. Cette année là, la famille Dalesmes de Châtelus acheta la terre de Salvanet, son château, ses dépendances et ses métairies pour y habiter en paix, pendant plus de trois siècles. Les Dalesmes furent en effet propriétaires de ce domaine jusqu’en 1849.
Au XVIIIème siècle, ils habitaient encore le vieux château situé au cœur du fief de Salvanet, sur un versant dominant la vallée du Taurion. Mais en 1772, ils décidèrent d’installer une nouvelle demeure qui bénéficierait du site et d’une vue largement ouverte en direction du Taurion. L’architecte Joseph Brousseau, aidé de son frère entrepreneur Mathurin Brousseau, originaire de Limoges fut chargé du projet. C’était un personnage en vue, réputé pour la qualité de son travail. Ces deux frères participèrent à la construction de l’Evêché de Limoges. Ils construisirent le Palais Episcopal de Sées, ainsi que de nombreuses églises, musées ou hôpitaux. Ils sont également les auteurs de l’hôtel de Rigoulène à Saint Léonard, ainsi que des châteaux de Faye, Lavergne, Thouron, Brignac, La Cosse etc…
Pendant les quelques années qui précédèrent la Révolution la famille Dalesme eu le privilège d’habiter cette nouvelle demeure, moderne pour l’époque, d’un classicisme élégant et entouré d’un parc joliment dessiné. Mais cette époque agréable ne dura pas longtemps car la révolution fit payer injustement un lourd tribut à la famille Dalesme. Les révolutionnaires de Limoges -et non ceux de St Priest – vinrent marteler le cartouche du fronton de la maison contenant les armoiries de la famille Dalesme. Ils pillèrent l’intérieur, épargnant tout de même la glace du grand salon et le médaillon de Louis XV situé au dessus. Ils emprisonnèrent les habitants de Salvanet et leurs domestiques, les laissant plusieurs années en prison dans des conditions très difficiles. Le seul Dalesme émigré en Angleterre, revint à Salvanet à la fin de la Révolution. Il essaya de récupérer ses biens et de redresser la situation désastreuse dans laquelle sa famille était plongée. Son fils poursuivi son œuvre, mais ruinée la famille Dalesme fut obligée de vendre la propriété en 1849, après 340 ans et quinze générations.
Milieu XIXème, modernisation du château de Salvanet.
La famille Talamon acquiert alors toute la propriété. Ces bourgeois fortunés entreprennent de grands travaux et transforment la maison en y ajoutant un étage mansardé, supprimant ainsi la terrasse à l’italienne ornée de balustres en granit. Ils installent également l’eau courante ainsi qu’un chauffage central à vapeur, encore en fonction aujourd’hui. Mais au bout de dix ans leur fille meurt accidentellement à cause des travaux. Submergés de chagrin , les Talamon quittent Salvanet et vendent la propriété à un marchand de biens.
Depuis 1869, la propriété de Salvanet.
C’est enfin en 1869 que la dernière famille (celle qui habite encore aujourd’hui la maison) arriva à Salvanet. Adrien-Charles Calley de Saint Paul, issu d’une bourgeoisie industriellle et gendre du savant Louis-Joseph Gay-Lussac, acquiert la propriété de Salvanet. Outre le château, son parc et la réserve, la propriété comportait un jardin potager clos avec deux serres, une dizaine de métairies, deux étangs et environ 180 hectares de bois situés principalement le long du Taurion ; l’ensemble formant près de 300 hectares d’un seul tenant. Les deux filles de Calley de Saint Paul, devenu ensuite sénateur de la Haute Vienne, épousèrent l’une le fils du Maréchal Bugeaud et demeura sans descendance et l’autre épousa le Général Emile Fleury aide de camp de l’empereur Napoléon III.
Des trois fils du Général Fleury (Maurice, Adrien, Emile) l’héritage de Salvanet échut au second qui avait épousé Renée Bianchi, fille de Marius Bianchi agent de change. Veuve en 1924, elle a animé la vie de Salvanet jusqu’en 1947. Pendant la première guerre mondiale, en compagnie de sa fille Hélène (plus tard Marquise de Laguiche) elle s’est dévouée pour soigner les blessés de l’hôpital de St Léonard. Pendant la seconde guerre mondiale elle a accordé refuge à la Légation des Pays Bas qui s’est donc installée à Salvanet. Farouchement « française », elle sut apporter initialement son soutient au Maréchal Pétain qui représentait pour elle l’ordre, la fidélité à l’armée qui avait marqué toute sa jeunesse. Cette disposition la fit œuvrer en faveur de « l’armée secrète » le moment venu. Luttant contre l’occupant allemand, elle camoufla, sous un tas de foin dans la ferme de Salvanet une automitrailleuse conservée pour la résistance. Elle a eu la douleur de perdre son gendre, le Marquis Jean de Laguiche, déporté au camp de Neu Stassfurt, assassiné par les Allemands le 17 avril 1945. Elle a été fière de l’attitude de son petit-fils Claude de Laguiche, alias Pascal de Follin, Saint Cyrien de la promotion Maréchal Pétain (Aix en Provence 1942) évadé de France (Réseau Alliance, Carantec Bretagne) d’où il a rejoint la 2ème DB en Afrique. Tué par les Allemands à 22 ans, le 8 Août 1944, à la Hutte Coulombier (entre Le Mans et Alençon).
La propriété de Salvanet est ensuite passée au Vicomte Jacques Fleury, puis au Comte Renaud de Laguiche, les fils et petit-fils de cette résistante héroïques et les frères et fils d’Hélène Fleury, Marquise de Laguiche. Aujourd’hui la fille de ce dernier, Ghislaine de Laguiche, épouse de Cédric Henriot, en assure la déstinée avec leurs cinq enfants : Fanny, Etienne, Olivier, Adrien et Léopold.
Depuis GayLussac, tous ces personnages ornent la maison de leur présence par leurs bustes et tableaux. Pourtant, à peine un siècle s’est écoulé depuis l’arrivée de cette nouvelle famille, descendante de Gay Lussac. Mais les cinq enfants d’aujourd’hui sont déjà la septième génération qui joue, travaille et dort dans les chambres de la maison. Ils sont jeunes et partent découvrir le monde ; plus tard ils reviendront dans la maison de leurs ancêtres pour les vacances, pour y vieillir… et transmettre à leur tour cette demeure et ces terres, les vieux arbres, ainsi que les valeurs d’une famille chrétienne, patriote et humaniste.
Cédric Henriot